Le Tailleur et l’Ouragan, adaptation ludique d’un conte recueilli par François-Marie Luzel (1821-1895).
Marqué à jamais par les veillées du manoir familial, à Plouaret, dans le Trégor, Luzel se consacra avec passion à la collecte des vieux textes littéraires et des contes de veillées.
Dans le récit de veillée, un art « pauvre » est à l’œuvre, accordé à la condition d’un public en phase avec des histoires merveilleuses ou facétieuses, mais toujours si simples, si dépouillées de tout ornement qu’elles semblent parfaitement ingrates à tout lecteur moderne féru d’effets spéciaux et de superproductions avec monstres et machines diaboliques, épreuves extraordinaires et héros hyper-vitaminés. Le monde inventé par notre conteur paraît, en effet, bien conventionnel : un mulet « qui fait des crottes en or », une serviette et un bâton magiques, des figures « surnaturelles » dotées d’un comportement si manifestement humain, un personnage principal - ce héros si mince (un tailleur !) - affligé d’une naïveté pendable. Mais si justement le principal ornement de notre histoire était de n’en avoir aucun – « la brèveté, selon La Fontaine, étant l’âme du conte » ! Ainsi, le fabuleux est là, à notre porte, Ouragan est notre voisin, et Hiver un pauvre bougre, un pas-de-chance, et la première victime des malheurs qu’il est chargé, par sa fonction même, de mettre en scène. L’humanité est donc la chose du monde la mieux partagée, l’étrangeté n’a pas le temps d’être inquiétante, et ce héros si maladroit est comme chez lui dans le merveilleux. La simplicité s’appellerait alors élégance. A-t-on besoin d’autres moyens ?